Mes collections Sandrine Expilly
" Loin du monde brillant de la mode ou du cinéma pour lequel Sandrine Expilly réalise des portraits, la photographe aime aussi flasher des lieux abandonnés et déglingués. Contempler l’eau d’une piscine désafectée pour se ressourcer, pour oublier les flots de fans qui déferlent sur la Croisette ou l’écume des célébrités en vogue. Sandrine Expilly a réalisé la célèbre image de Björk en femme-fleur dans une robe de pétales artificiels, mais elle n’a pas limité son champ d’investigation aux étoiles. Elle a déniché dans un palace de Cannes une simple cabine téléphonique métallisée des années 70, noyée dans les plantes vertes. Elle a dû patienter pour saisir le rare moment de calme pendant lequel aucun client de l’hôtel ne se trouvait assis dans ces fauteuils orange. Niort, Pantin, Groningen, Kayenta... plus ancrés dans l’univers du quotidien, un vague à l’âme provincial ou banlieusard se dégage de ses vitrines de vêtements d’occasion et de ses magasins en faillite.
Un cintre est resté suspendu. Un vieux savon a été oublié dans une salle de bains. Noyés dans un brouillard verdâtre ou bleuté, des absents ont laissé au mur des graffitis et un cœur transpercé. Sandrine Expilly relève des empreintes. Trace de toi... Trace de nous tous, qui avons porté cette veste seventies ou cette chemise. Pour se distancier d’un monde hyperactif, l’artiste repose son œil en dirigeant son objectif sur le coussin d’une chaise. Il a peut-être conservé la forme d’un ami assis il y a quelques minutes ou quelques jours. Comme Félix Gonzalez-Torres ou Sophie Calle conservaient les marques du passage de leurs amants, Sandrine Expilly veut fixer l’empreinte d’un corps dans un drap, un oreiller ou une tapisserie, pour marquer par un vide criant le souvenir décalqué de personnes aimées ou disparues." Denis Angus